Hommage à

 

Conférencier, auteur, podcasteur, entrepreneur, plus de 332000 followers et un CV plus long que la feuille de style de mon site perso’, Jeffrey Zeldman fait partie des grands du web, des influents. Il est de ceux qui rassemblent les communautés, de ceux qui ont rendu le web meilleur. Et qui nous rendent meilleurs. Car c’est bien une leçon de design web à laquelle on a le droit quand il prend la parole.

Ce monsieur a compris tout ce qui fait la qualité des projets web. Une bonne narration, la connaissance de son sujet, le contenu avant tout et la conscience du médium sur lequel on travaille.

Quelques points qui m’ont particulièrement marqué dans sa vision du web :

La notion de web natif

Je ne suis pas de ceux qui pensent qu’il faut renier l’héritage du papier. Il s’agit d’un médium mature qui a profité de plusieurs siècles de travail pour arriver à être aujourd’hui parfaitement réglé.

Le web, de son côté, pèche encore dans beaucoup de domaines. De par son aspect mouvant, on ne dispose pas d’autant de maitrise sur lui. Les options de mise en page par exemple sont loin derrière ce qui se fait en imprimerie.

Mais il évolue vite aussi. La qualité des écrans n’a aujourd’hui plus rien à envier au papier et la palette de couleur et infiniment plus riche que ce qu’on peut obtenir en impression.

Il n’est pas non plus composé uniquement de texte et d’images fixes. Si comme le pensait Marshall McLuhan, les médias qui naissent contiennent les anciens médias, alors le web est le parfait exemple. Ça s’anime, ça bouge, ça communique, par tous les moyens possibles.

En tant que designers web, nous sommes les descendants du print. Plus moderne, certainement plus prompts à évoluer, cela ne nous empêche pourtant pas d’aimer profondément nos aïeux, tout en reconnaissant leurs faiblesses.

Jeffrey Zeldman aime le papier, c’est frappant quand il parcours avec amour les BD de son enfance ou ses anciens livres sur la publicité. Mais il a bien compris qu’il ne faut surtout pas tenter d’en faire une imitation sur nos écrans.

Itération

C’est une évidence, le web évolue constamment et très rapidement. Ça n’est pas seulement les technologies d’hier qui sont obsolètes mais aussi les manières de penser et de travailler. Nous n’avons plus, aujourd’hui, un processus linéaire pour arriver à un résultat. La notion même de résultat final s’effrite. Car les projets ne sont jamais terminés, un site web est toujours en construction. Pas parce qu’ils ne sont jamais bien, mais parce qu’ils peuvent toujours être mieux.

Le web d’aujourd’hui se construit par la répétition des processus. Quand on demanda à Milton Glaser, un des plus grand graphiste du 20ème siècle, comment il abordait la création graphique il répondit  simplement :

“I move things around until they look right”
— Milton Glaser

Ce qu’il faut comprendre de cette explication pleine d’humilité ce n’est pas qu’on fini par avoir de la chance en « touchant des trucs », c’est justement l’inverse. Les grandes idées ne viennent pas quand on marche au bord de la mer, elles ne viennent pas toujours non plus quand on prend sa douche. Elles viennent quand on travaille son sujet, quand on répète les processus.

Standards du web

L’Internet n’a pas de chef, et permet à tout le monde de créer. Cela semble merveilleux en théorie et ça l’est. Mais dans la fin des années 90, cet espace sans règle avait du mal à se fonder des bases solides.

C’est sur un fond de guerre commerciale entre les géants du web de l’époque et un chaos grandissant que Jeffrey Zeldman a réussi à imposer ce qu’on appelle les standards du web. Ces standards sont des recommandations, des bonnes pratiques visant à harmoniser l’ensemble des outils du web. Par exemple un navigateur pourra ajouter des fonctionnalités mais devra d’abord respecter les standards. C’est comme ça que les outils gardent une base commune.

En tant que designer web, il est naturel de respecter les standards, de respecter la sémantique. Mais pas simplement parce que c’est mieux, pas simplement parce que c’est sémantique. La principale raison est que ça rend le web accessible. Respecter les standards aujourd’hui c’est s’assurer que ce qu’on crée est accessible à tous et sera toujours lisible demain.

On touche selon moi le point le plus important de la prise de conscience qu’a apporté Jeffrey Zeldman :
On ne design pas pour que cela fonctionne sur un navigateur, on ne design pas pour que s’affiche sur un écran mobile, on design pour que tout le monde ait accès à l’information.

 


 

Et c’est l’essence même du web, donner à tout le monde l’opportunité de s’informer, de communiquer et de partager.
J’étais bien parti pour faire une déclaration d’amour à Monsieur Zeldman. Ça ressemble finalement à une déclaration d’amour au web. Mais sont-ils différents ?

D’après
Jeffrey Zeldman: 20 years of Web Design and Community
&
Ten Commandments of Web Design – Jeffrey Zeldman at An Event Apart Austin 2013
&
Content First by Jeffrey Zeldman – An Event Apart Boston